Parlons-en (10) – Sont-ils tombés sur la tête chez Bpost ?

Ce vendredi, la banque de la poste a brutalement annoncé qu’elle rendait payants les retraits d’argent effectués sur son propre réseau de guichets avant de se rétracter quelques heures plus tard.

Une banque encore publique

Bpost est une société cotée en bourse, dans laquelle l’État belge détient aujourd’hui environ 51% de son capital. Ce qui signifie que les 49% restants sont aux mains d’actionnaires privés. Telle est sa situation actuelle sachant que sa privatisation totale est en marche.

Cette banque comme toutes les autres, réalisent des profits par un mécanisme assez simple : grâce aux dépôts que vous lui confiez et qui lui servent alors à accorder des prêts. En effet, vos dépôts ne sont pas rémunérés – tout au contraire, puisque chaque opération que vous réalisez est facturée. Par contre, les crédits octroyés par bpost le sont contre paiement d’intérêts plus ou moins élevés selon la période. Le profit des banques provient de la différence entre ce qu’elles paient sur les fonds empruntés – intérêt zéro pour les dépôts – et ce qu’elle reçoit sur les fonds prêtés – intérêts positifs. (Techniquement, le profit bancaire est égal à la différence entre les intérêts débiteurs et les intérêts créditeurs de la banque.)

La conclusion, c’est que plus une banque accorde des crédits et plus ses profits grossissent, à condition bien sûr qu’elle surveille la qualité de ses prêts. En effet, si l’emprunteur (entreprise ou particulier) est incapable de rembourser sa dette, alors la banque en question subira une perte sèche et pourra même parfois tomber en faillite.

Évidemment, au fil du temps, les différents États ont appris à réguler les banques en introduisant notamment la garantie des dépôts jusqu’à un montant de 100.000 euros.
Il reste cependant, comme la crise financière de 2008-2009 l’a montré récemment, que les États doivent parfois intervenir pour éviter l’effondrement de tout le système et ce, parce qu’une banque dite systémique est en mauvaise posture. Deux exemples bien connus en Belgique sont ceux de Dexia ou de KBC.

Les temps sont difficiles

Les profits bancaires ont connu des jours bien meilleurs dans le passé. En cause, le bas niveau des taux d’intérêt actuels qui diminuent les profits en question. Voilà la raison essentielle du mal-être des banques : leurs bénéfices baissent parce que les taux qu’elles pratiquent sont nettement plus bas que ceux qui prévalaient il y a quelques années encore. Mais elles ne peuvent les augmenter isolément, faute de quoi la concurrence les éliminerait inexorablement.

En conséquence, toutes les banques cherchent aujourd’hui à diminuer leurs coûts en réduisant le personnel qu’elles emploient, en sabrant dans leur réseau d’agences ou encore en poussant à l’utilisation du numérique (la banque en ligne, moins coûteuse puisque le client réalise lui-même ses opérations).

Mais tout cela ne suffit pas encore. Le grand objectif des banques est à présent de facturer au prix fort les services bancaires et à terme de faire disparaître le cash, l’argent liquide. Elles relèvent donc leurs tarifs régulièrement et c’est ainsi que Bpost a décrété que désormais ses clients paieraient 50 centimes par retrait, même si ce dernier est effectué sur ses propres distributeurs de billets. (Elle a précisé « au-delà d’un retrait par mois ».)

Finalement, Bpost a fait marche arrière. Elle s’est justifiée en disant : « Nous sommes sans doute allés un peu vite en besogne ». Curieuse argumentation qui revient à affirmer que le paiement des opérations n’est qu’une simple question de temps. Nous voilà prévenus !

La nécessaire « révolution bancaire »

En octroyant des prêts, les banques commerciales créent de la monnaie de crédit, encore appelée monnaie scripturale ou de banque. Un tel phénomène est possible, parce qu’elles ne conservent qu’une fraction de leurs dépôts sous forme de billets – c’est leur encaisse, dit-on – et prêtent le solde à leurs clients, particuliers ou entreprises.

On considère généralement que la monnaie créée par les banques est cinq fois plus importante que les billets et pièces en circulation. Cette création de monnaie bancaire a des effets profondément déstabilisateurs pour l’économie dans son ensemble. En particulier, les cycles économiques et financiers, la récurrence des périodes de récession et d’expansion, s’expliquent par l’émission non maîtrisée de monnaie de banque.

Le cœur de la « révolution bancaire » consiste donc à éclater la banque universelle en séparant radicalement fonction de gestion des dépôts et fonction de prêt, de telle sorte que plus aucune création de monnaie par les banques ne soit possible.

C’est une des revendications fortes de Wallonie Insoumise.

9 février, 2019

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